Pierre
Pestieau
La pertinence d’un propos dépend-elle de la moralité de
celui qui le profère ? En d’autres termes, une affirmation telle que « le
harcèlement sexuel est haïssable et devrait être davantage poursuivi »
serait-elle moins fondée si elle émanait de Harvey Weinstein, connu aujourd’hui
comme le porc. Cette question est
proche de celle que soulevait Marcel Proust dans son Contre Sainte Beuve, quand il s’attaquait à celui pour qui l'œuvre
d'un écrivain serait avant tout le reflet de sa vie et pourrait s'expliquer par
elle. Proust estimait que la critique d’une œuvre devrait être dépourvue
d'éléments qui lui sont extérieurs.
Cette réflexion m’est venue à la lecture d’un roman que
je recommande, L’imposteur, qui
narre l’histoire d’un homme qui fut longtemps en Espagne le président emblématique
de l’Amicale de Mauthausen en portant ainsi la parole des rescapés des camps de
la mort, alors qu’il n’y avait jamais mis les pieds (1). L’auteur, Javier
Cercas, s’interroge sur les conséquences de la découverte de cette imposture.
Servira-t-elle d’argument aux négationnistes ?