jeudi 7 septembre 2017

Mondialisation et populisme

Pierre Pestieau

Dans un récent article (1), l’économiste américain Dani Rodrik étudie l’émergence des mouvements populistes en Europe et en Amérique. L’argument central de son article est que la mondialisation dans son stade avancé se prête à une réaction populiste, lequel peut prendre différentes formes selon les fractures sociales que les politiciens peuvent utiliser en exploitant les courants anti-establishment. Par stade avancé de la globalisation, qu’il appelle hypermondialisation, il veut dire que les gains d’efficacité ne réussissent pas à compenser les pertes redistributives. On trouvera du populisme de gauche là où l’impact de la globalisation se manifeste dans les domaines de la finance, du commerce et de l’investissement international. En revanche, le populisme de droite apparaîtra là où la globalisation se traduit  par de l’immigration et particulièrement l’afflux de réfugiés.


Rodrik observe que le populisme est déjà apparu lors de la première vague de mondialisation durant la seconde moitié du 19ème siècle, qui elle aussi a connu un stade avancé.

Selon lui, lors de la campagne présidentielle américaine, les facteurs favorisant l’un et l’autre populisme se seraient retrouvés aux Etats Unis : un populisme de droite avec Donald Trump et un populisme de gauche avec Bernie Sanders. En Amérique Latine, on aurait surtout du populisme de gauche et en Europe du populisme de droite, à l’exception des mouvements de gauche Syriza et Podemos.

Rodrik est un économiste brillant et son article en témoigne. Trois points me gênent dans son argumentation. D’abord, et beaucoup d’études l’ont montré, le populisme s’explique par de nombreux facteurs qui vont bien au delà de l’immigration ou des pertes d’emploi liées  aux délocalisations industrielles. Ensuite, il adopte une objectivité factice qui consiste à traiter sur le même pied les mouvements xénophobes d’extrême droite et les mouvements qui contestent la sociale démocratie. Le Pen et Mélenchon, « blanc bonnet et bonnet blanc » (2), comme aurait dit Jacques Duclos, c’est un peut court. Finalement, il me semble naïf et prétentieux de couvrir deux continents, l’Europe et l’Amérique aux histoires et institutions tellement différentes.


(1) Dani Rodrik, Populism and the economics of globalization, John F. Kennedy School of Government Harvard University 2017

(2) Cette phrase a été prononcée par le candidat communiste Jacques Duclos en 1969 au sujet de Georges Pompidou et Alain Poher qui s’affrontaient au second tour de l’élection présidentielle.

1 commentaire:

  1. Pierre, si tu fais un blind test a partir des programmes économiques de Mélenchon et Le Pen je ne suis pas sur que tu t'y retrouves. C'est sensiblement la meme chose.

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