jeudi 25 août 2016

Tricheries aux jeux Olympiques ? Mais non, bien sûr, et puis…

Victor Ginsburgh

… les jeux dont il est question ici sont ceux qui se sont passés en Grèce, il y a quelque 2 500 ans. En cherchant un peu, je suis tombé sur un article de Clarence Forbes (1) qui décrit les tricheries utilisées à l’époque, bien plus innocentes que celles d’aujourd’hui, et dont les auteurs (ou les villes pour lesquelles les athlètes concourraient) étaient soumis(es) à des amendes utilisées à ériger des statues de Zeus autour des stades, et dont les piédestaux mentionnaient les noms des tricheurs.

La « tricherie » la plus courante consistait à « jeter un sort » au concurrent. Il n’est pas sûr que cela fonctionnait très bien, et il a fallu passer à une vitesse supérieure. Déjà le mythique fondateur des jeux, un certain Pelops, avait gagné une course de char contre un puissant roi, après avoir corrompu l’aurige de saboter le char du roi. Cela commençait donc bien.


D’après Pausanias, écrit Forbes, il y avait trois méthodes essentielles :

(a)            Les cités qui participaient aux jeux attiraient les athlètes à se déclarer comme leurs représentants même s’ils n’étaient pas citoyens de la cité (2). Un athlète de la cité de Crotone a couru pour la ville de Syracuse ; Crotone a détruit la statue du coureur, a saisi sa maison privée et l’a transformée en prison. Quelques années plus tard, à Rio, Ahmad Abughaush, Palestinien né en Jordanie a reçu la médaille d’or dans un sport du nom de Taekwondo ; mais, les Juifs Israéliens n’ont pu s’empêcher de dire, qu’Ahmad était d’origine israélienne, tout en étant né en Jordanie où ses grands-parents avaient « déménagé » d’Israël à un certain moment non précisé (3) ; mais ils n’ont pas été jusqu’à bombarder la maison en Jordanie.
(b)           Corrompre le concurrent. Le boxeur Eupolus de Thessalie a payé trois de ses concurrents pour lui permettre de gagner. Tous les quatre ont été punis ; leur amende a permis d’ériger six statues de Zeus, dont quatre ont été consacrées au scandale.
(c)            Utiliser des coups bas ou interdits. Par exemple, mordre l’adversaire, lui enfoncer les doigts dans les yeux, comme dans la représentation de la scène de lutte ci-dessus, ou lui tordre les testicules (il faut se rappeler que les lutteurs se battaient nus, et que les femmes n’étaient pas admises au spectacle).
Stade de Rio avec le Corcovado au milieu en haut

Il y a aussi eu des juges corrompus qui votaient injustement pour leur propre cité, ce qui n’est pas sans rappeler l’échange de bons procédés entres juges russes et français aux jeux d’hiver à Salt Lake City en 2002. Une médaille d’or est attribuée au couple de patinage artistique russe, après une prestation émaillée d’une faute grossière. La juge Française Marie-Reine Legougne aurait placé les Russes en tête et ce, en échange de la promesse russe de favoriser la victoire du couple français dans l’épreuve de danse. La Française et Didier Gailhaguet, le président de la Fédération française seront suspendus 3 ans (4). Et on a placé douze statues du président Chirac déguisé en Zeus, dans le stade des jeux d’été organisés à Athènes en 2004.

Sans oublier les cas de corruption dans l’attribution du droit d’organiser les jeux eux-mêmes, comme ceux des jeux d’hiver de 2002 à Salt Lake City (5). Ni la main non tendue d’Hitler à Jesse Owens en 1936 parce qu’il était noir, ni le refus de l’athlète égyptien de serrer la main que lui tendait son vainqueur l’israélien aux Jeux de Rio, ni la fréquente collusion entre autorités olympiques nationales et internationales et dictatures (l’espagnol franquiste, le marquis de Samaranch affilié à la Phalange espagnole est resté président du Comité international olympique de 1980 à 2001 !).

Mais comme on peut le voir, à part les drogues diverses, rien de très neuf sous le soleil depuis les premiers jeux à Olympie, on ne sait pas trop combien d’années avant J.C.

[Un version légèrement différente de ce texte a également paru dans L'Echo du 25 août 2016].


(1)           Clarence A. Forbes, Crime and punishment in Greek athletics, The Classical Journal 47 (1952), 169-173+202-203.
(2)           Cette pratique est évidemment courante dans les sports aujourd’hui, sauf que la corruption consiste à acheter des joueurs pour plusieurs millions : le footballeur Paul Pogba a ainsi été « transféré », de la Juventus à Manchester United pour 105 millions d’euros en 2016.
(3)           Palestinan with Israeli roots wins Jordan’s first Olympic medal, Jewish Telegraphic Agency, August 19, 2016.
(4)           https://fr.wikipedia.org/wiki/Scandale_en_patinage_artistique_aux_Jeux_olympiques_d%27hiver_de_2002
(5)            https://fr.wikipedia.org/wiki/Scandale_de_l%27attribution_des_Jeux_olympiques_d%27hiver_de_2002


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