jeudi 23 octobre 2014

Après cela je me tairai sur Israël, parce que je n’aurai plus rien à ajouter


Victor Ginsburgh

Voici la traduction intégrale d’un article de Carolina Landsmann, paru dans Haaretz, le journal courageux de ce qui reste de la gauche israélienne. Après cela je cesserai de vous ennuyer avec les obsessions liées à mes origines, parce que je ne pourrai rien dire de plus ni de mieux. Tout aura été dit. Voici cet article (1).

Laissons la droite israélienne se fracasser et se brûler
Caroline Landsmann

Netanhayou et son gang veulent construire des colonies ? Lier le Hamas à l’Etat Islamique ? Retourner le monde contre nous ? Montrons leur ce qui va se passer.

Avant que le monde démocratique ne se précipite sur un
Mur
nouveau projet pour sauver la démocratie israélienne de la prochain attaque — cette fois menée par un membre de la Knesset (Parlement israélien), Ayelet Shaked qui veut ajouter une clause à la Loi de Base sur la Dignité Humaine et la Liberté permettant à la Knesset de ne plus soutenir la dignité humaine et la liberté 
[et de s’opposer à des décisions de la Cour Suprême]— nous devons nous poser et réfléchir. Nous devons réfléchir à cette dynamique étrange entre la droite et la gauche en Israël, et nous demander si elle fait avancer la cause de la démocratie.
Israël règne par la force sur le peuple palestinien depuis 47 ans. La plupart des Israéliens ne savent pas ou ne se rappellent plus qu’il peut exister autre chose que la domination d’un autre peuple. C’est sans doute la raison pour laquelle la société israélienne a internalisé cette situation comme étant normale et est capable de se juger, de juger ses réussites et ses erreurs, en ignorant le fait central qu’elle est une puissance occupante. Mais ceci n’est évidemment qu’une illusion. Chaque acte de vie sur le sol occupé est un acte de mort, de destruction et de flétrissure. C’est cela la tragédie existentielle d’Israël—le squelette dans notre armoire est vivant, et les Palestiniens sont parmi nous.


La démocratie israélienne occupe la Palestine et a fait de tous ses citoyens des partenaires du crime. Le fait que ce contrôle des Palestiniens est exercé par un gouvernement démocratique ne fait qu’accroître la responsabilité de chacun de nous pour ce qui est fait en notre nom.  Après tout, si nous vivions dans une dictature, nous pourrions au moins nous dire : « Nous ne pouvions rien faire, c’était dangereux. Nous avions peur pour notre vie et pour celle de nos enfants ». Mais quels mots pourront nous défendre dans les livres d’histoire ? La situation est complexe parce que plus nous sommes démocratiques, plus nous portons la responsabilité pour le mal que nous faisons.

C’est pourquoi nous ne devons pas être surpris que la gauche considère la droite comme une dictature. Ce qui lui permet de murmurer : « Que pouvons-nous faire ? », au lieu de payer le prix pour changer la réalité dans laquelle nous vivons. Parce qu’enfin, que signifie « être démocrate » ? Faut-il attendre que nous défendions des politiques anti-démocratiques au nom de la démocratie dépouillée de son âme, et nous réjouir, comme si elle était toujours vivante ? A ceux qui croient cela, nous devons répondre que nous ne sommes pas des nécrophiles. Si c’est cela qu’est devenue la démocratie israélienne, alors nous n’en voulons plus.

Celui qui se sent inquiété par cette notion de démocratie doit rompre ses connections avec l’occupation. C’est une traîtrise politique de défendre volontairement le régime actuel. Le dernier exemple est l’effort fait par le gouvernement d’Israël pour faire dérailler les décisions des parlementaires suédois et britanniques de reconnaître symboliquement l’Etat Palestinien. Le camp qui s’oppose à l’occupation doit arrêter de freiner les conséquences qui découlent naturellement de cette occupation.

Que du contraire. On doit permettre au premier ministre Netanyahou et à sa bande de se laisser aller sur la pente glissante vers laquelle il amène son pays. Ils veulent des colonies ? Laissons les construire. Ils veulent rétrécir les prérogatives de la Cour Suprême de Justice ? Laissons les rétrécir ces droits et laissons les Juges se démettre de leur fonction. Ils veulent se mettre le monde entier à dos ? Très bien. Lier le Hamas et l’Etat Islamique ? Allons-y. Veulent-ils voir ce qui se passera quand les masses appauvries n’auront plus rien à perdre ? Ou bien ce qui arrivera quand un peuple occupé se verra dessaisi de tous ses moyens ? Avec plaisir, qu’ils voient.

C’est difficile à accepter, mais c’est peut-être en se fracassant contre la réalité des choses que les conditions d’un changement politique mûriront et nous donneront la possibilité d’être un peuple libre dans notre pays.

(1) Carolina Landsmann, Let the Israeli right crash and burn, Haaretz, October 22, 2014, http://www.haaretz.com/opinion/.premium-1.622102


1 commentaire:

  1. merci, même si c'est pas toi qui l'as écrit, tu aurais pu. On peut pas dire que ça ouvre des horizons merveilleux, mais au moins cela a le mérite d'être clair et inattaquable.

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