jeudi 10 octobre 2013

A ceux qui n'ont pas le choix : Peine de mort aux Amériques


Victor Ginsburgh

Les Etats (américains) dans lesquels continue d’exister la peine de mort — rassurez-vous, il n’y en a plus que 32 sur 50, quel progrès (1) — sont en panique : le Texas, l’Ohio, l’Arkansas et quelques autres ne parviennent plus à se procurer le triple cocktail (thiopental de sodium, bromure de pancuronium et chlorure de potassium, avis aux amateurs) qui permet d’exécuter les « criminels », et se demandent comment ils vont pouvoir continuer. La plupart des exécutions sont dès lors remises de jour en jour et le processus s’est enrayé, explique le New York Times (2). La Cour Suprême du Missouri vient heureusement d’autoriser le propofol. Rappelez-vous l’effet que ce produit a fait au pauvre Michael Jackson, donc cela semble en effet fonctionner pas trop mal. 


Quelles sont les raisons de cette rupture d’approvisionnement d’une matière dont il ne faut certes pas des tonnes tous les jours ? Il semble que, suite à des pressions notamment en provenance d’Europe (3), les producteurs commencent à refuser de la fournir aux prisons dont les stocks sont épuisés. Certaines prisons recourent alors à des producteurs non autorisés, non soumis aux règles habituelles du contrôle de qualité du produit, ce qui pose évidemment des problèmes à ceux qui sont bien intentionnés !

Mais plus intéressant, ou amusant, si l’on peut dire en la circonstance, un juge fédéral de Washington a interdit aux Etats-Unis d’importer du thiopental de sodium, parce que le produit n’avait pas été approuvé par le Food and Drug Administration. Une bonne excuse qui permettra de postposer des exécutions, ou un excès de zèle ?

D’après Kent Scheidegger, un des directeurs de la Justice Legal Foundation qui est favorable à la peine de mort, il s’agit plutôt d’un problème créé artificiellement par ceux qui soutiennent son abolition. Ces salauds (dit en substance Scheidegger) espèrent qu’en retardant les exécutions, de plus en plus d’Etats se décourageront et finiront par les abandonner. La preuve est donnée par l’Arkansas (l’Etat de notre grand ami Bill C.), dont le gouverneur actuel a suspendu la peine de mort jusqu’à ce qu’on trouve un produit idoine pour l’appliquer. La Californie s’est plongée dans des études subtiles pour déterminer comment remplacer le triple cocktail miraculeux.

Il y avait en janvier 2012, 3125 condamnés qui attendaient leur exécution dans les couloirs de la mort des prisons de 32 Etats. La pression publique contre son abolition reste très forte, mais les études menées par des économistes, des sociologues et des juristes montrent malheureusement souvent, pas toujours très soigneusement, ni de façon très convaincante, que la peine de mort aurait un effet dissuasif sur la criminalité. Un article récent d'un juriste de la Columbia Law School fait le point sur la question et conteste l'effet de dissuasion (4).






(1) Pour la liste des Etats, voir http://www.deathpenaltyinfo.org/states-and-without-death-penalty. Pour la liste des prisons voir http://en.wikipedia.org/wiki/Death_row
(2) Rick Lyman, Deat row improvises, lacking letaht miw, The New York Times, August 18, 2013. http://www.nytimes.com/2013/08/19/us/death-row-improvises-lacking-lethal-mix.html
(3) Notamment d’Italie et du Danemark, qui fabriquent ces produits pour des usages divers, mais refusent depuis peu de les livrer aux prisons.
(4) Voir Jeffrey Fagan, Capital punishment : Deterrent effects and capital costs,

1 commentaire:

  1. ça va les copains? le bon âge de mourir, le bon poison pour tuer les condamnés à mort, bref, comme disait (à peu près) Valery devant la tombe de qui je méditais l'autre jour en regardant "ce toit d'ardoises où marchent les colombes", "la mort , la mort, toujours recommencée" ...
    Mais aussi quelques vers du même utile au patient (enfin...) que je suis et que vous êtes sans doute:
    "Patient, patience,
    Patience dans l'azur,
    Chaque atome de silence
    Est la promesse d'un fruit mûr"
    Mûr, pas blet! pas prêt à faire le mur, le mort, mais l'amour.
    RK

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