vendredi 17 février 2012

Small is not beautiful : la taille des ménages

Pierre Pestieau

En 2005, la taille moyenne des ménages belges était de 2,35 personnes, contre 2,98 personnes en 1970. La part des ménages d'une seule personne dans le nombre total des ménages a sensiblement augmenté, passant durant cette période de 18,78 % à 33,00 % du total. En 2005, un ménage sur trois était donc composé d'une seule personne (1). On observe les mêmes tendances en France (2) où le nombre moyen de personnes par ménage était de 3,1 en 1968 pour passer à 2,3 en 2008. Il devrait encore se réduire à 2,04 en 2030. Imputable en grande partie au vieillissement de la population, à la baisse de la fécondité et à l’éclatement des familles, la baisse de la taille des ménages est un phénomène universel et quasiment inéluctable.

Ce phénomène a plusieurs implications sociales, psychologiques et économiques. Me limitant à ces dernières, le rétrécissement des familles conduit nécessairement à une réduction du pouvoir d’achat des ménages. On a coutume de penser qu’il faut plus de ressources pour assurer un même niveau de consommation à quatre personnes isolées qu’à quatre personnes vivant sous le même toit. Selon l’échelle d’équivalence la plus courante, pour atteindre le même niveau de bien être, il faudrait 1/3 de ressources en moins pour le ménage de 2 personnes adultes que pour 2 ménages de personnes isolées. On parle d’économies d’échelle au sein du ménage. Il existe d’autres types d’économies liées à la vie à plusieurs. Le premier trouve son origine dans la solidarité familiale qui se manifeste surtout par la cohabitation. La personne seule doit recourir davantage au marché ou à l’assurance/assistance sociale que si elle vivait dans une famille élargie. La famille limitée à deux générations ne peut bénéficier de l’aide des grands parents pour garder les enfants et inversement les grands parents qui vivent seuls ne peuvent compter sur la présence de leurs enfants en cas de perte d’autonomie. Un autre type d’économie concerne les services et infrastructures publics. La distribution du courrier, la collecte des immondices, les connections avec les réseaux d’eau, d’électricité et de gaz sont d’autant plus coûteuses que le nombre de ménages augmente sans que la population totale ne change. Enfin il y a le coût pour l’environnement. La fameuse empreinte écologique est d’autant plus élevée que la taille du ménage est réduite.

Il n’est sans doute pas possible de mesurer avec exactitude les coûts multiples qu’entraîne le rétrécissement des ménages. Il est néanmoins possible d’en faire une évaluation approximative. A ma connaissance, cela n’a pas été fait. Une question sans doute plus importante est la question léniniste : que faire ? Ou plus précisément, peut-on faire quelque chose ? Le phénomène dont il est question a des causes multiples. L’éclatement de la famille traditionnelle cache différents comportement : le veuvage, l’émancipation précoce des enfants, le divorce. La baisse de la fécondité et la hausse de la longévité sont des phénomènes démographiques sur les quels il est difficile d’agir. On peut regretter le premier et se réjouir du second sans plus. On peut certainement songer à des formules incitatives encourageant l’habitat regroupé, à la manière des politiques encourageant le covoiturage. Mais généralement, on devine que sans une révolution copernicienne des mentalités, il sera difficile de retourner à la famille élargie et solidaire.

(1)Voir < http://www.plan.be/websites/tfdd_88/fr/r5fr_fichessite74.html>

(2)Voir < http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=AMFd1>

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