Pierre Pestieau
« On peut être super riche et se montrer super citoyen ! ». Voilà un des buzz (1) de cet été. En raison de la crise de la dette, des grands patrons veulent payer davantage d'impôts pour renflouer les caisses de l'Etat. Ce mouvement de générosité est parti de l'autre côté de l'Atlantique : c'est le milliardaire américain Warren Buffett qui a lancé le débat aux Etats-Unis en réclamant une hausse des impôts pour les « méga-riches » dans une tribune publiée le 14 août dans le New York Times (2). Que faut-il en penser ? Un effet d’annonce de quelques individualités qui se font ainsi mousser (3) sachant que la structure de leur patrimoine et l’ingénierie fiscale leur permet de payer moins d’impôts que la plupart des citoyens ? Ou y aurait-il une véritable volonté de contribuer davantage aux finances publiques ?
Il existe cependant des raisons plus économiques pour que les riches recommandent un meilleur partage de la charge fiscale. J’en citerai quatre. La première sans doute plus prégnante aux Etats- Unis qu’en Europe est le désir qu’ont les riches de contribuer à des œuvres charitables diverses. En l’absence d’incitations fiscales, ces contributions tendent à être faibles. Si les riches ont une forte préférence pour ces œuvres, ils pourraient souhaiter une augmentation de la fiscalité des revenus et du patrimoine qui, en exonérant fiscalement les contributions charitables, les favorise. Cette considération s’applique à l’impôt sur les revenus et aux droits de succession (5).
(2) http://www.nytimes.com/2011/08/15/opinion/stop-coddling-the-super-rich.html?_r=1
(3) Ou s’assurent un petit « coin de paradis ».
(4) Même Etienne Davignon plus près de chez nous s’est invité à la table de ces super riches devenus soudain des super citoyens.
(5) Voir “Political support for estate taxation and charities” de G. Casamatta, H. Cremer et P. Pestieau, ronéo, 2011.
(6) Voir “Optimal income taxation and the ability distribution: implications for migration equilibria,” de
J. Hamilton et P. Pestieau, International Tax and Public Finance, 12, 29-46, 2005.
(7) Alors qu’aux Etats Unis, ce sont vraiment les super riches qui sont intervenus, en Europe et en France particulièrement on ne retrouve pas dans la liste des pétitionnaires les vrais riches. Par exemple, Maurice Levy ne représente que la 238ème fortune française. Le Canard Enchaîné parle ainsi des « faux riches qui s’achètent une image » (31-8-2011).
(8) « Nous sommes conscients d’avoir pleinement bénéficié d’un modèle français et d’un environnement européen auxquels nous sommes attachés et que nous souhaitons contribuer à préserver », estiment les signataires de l'appel publié par le Nouvel Observateur.
Salut Pierre
RépondreSupprimeraprès le buzz du "please tax us", je propose le buzz des rentiers criant de concert "taxez nous". Car si il y a un vrai paradoxe c'est bien celui là. De tous temps libéraux et socialistes s'accordent à vouloir taxer les rentiers (Marx, Walras, Keynes, Allais, Pareto...) et pourtant les plus values, les rentes foncières, les rentiers sociaux, ...continuent depuis des siècles à échapper à l'impôt. Pourquoi?? Taxons tous ces revenus non-gagnés?